Qu’ont en commun Arles et Genève? Le Rhône, tout d’abord, qui baigne les rives des deux villes. Une voie de communication, de commerce et d’échanges traversant toute la province romaine de la Narbonnaise, trait d’union entre le Léman et la Méditerranée, entre le sud et le nord de l’Europe.


Épitaphe d'Aurelius Valens, responsable du bureau genevois du Quarantième des Gaules, découverte à Genève entre le passage du Terraillet et la rue du marché.

Elles partagent aussi un hôte que tout le monde connaît: Jules César. Il est proconsul de la Gaule transalpine lorsqu’il arrive à Genève en 58 av. J.-C., à marche forcée depuis Rome, déterminé à stopper l’émigration des Helvètes. Ceux-ci en effet souhaitent quitter la région lémanique pour trouver une herbe plus verte en Saintonge, près de Bordeaux. Eux partis, la route serait libre pour les peuples vivant au nord du Plateau, les Germains notamment.
Ni une, ni deux, César fait démonter le pont qui enjambe le Rhône à Genève, bloquant les Helvètes sur la rive droite. L’épisode est raconté dans son épopée “La Guerre des Gaules” (Livre I). Au chapitre 6, César – cité par les spécialistes de la Bibliothèque de Genève – dit ceci:

« Il y avait en tout deux routes qui leur permettaient de quitter leur pays [à savoir l’actuel plateau suisse]. L’une traversait le territoire des Séquanes : étroite et malaisée, elle était resserrée entre le Jura et le Rhône, et les chariots y passaient à peine un à un ; d’ailleurs, une très haute montagne la dominait, en sorte qu’une poignée d’hommes pouvait facilement l’interdire [c’est le défilé de l’Écluse]. L’autre route passait par notre province [c’est-à-dire le sud de la Gaule, appelée Gaule transalpine ou Gaule ultérieure par les Romains, et tombée sous la domination de Rome] : elle était beaucoup plus praticable et plus aisée, parce que le territoire des Helvètes et celui des Allobroges, nouvellement soumis, sont séparés par le cours du Rhône, et que ce fleuve est guéable en plusieurs endroits. La dernière ville des Allobroges, et la plus voisine de l’Helvétie est Genève. Un pont la joint à ce pays. Les Helvètes pensaient qu’ils obtiendraient des Allobroges le libre passage, parce que ce peuple ne leur paraissait pas encore bien disposé à l’égard de Rome ; en cas de refus, ils les contraindraient par la force. »

Privés de pont, les Helvètes sont contraints de passer par le Jura. Les voilà poursuivis par César, puis défaits à la bataille de Bibracte. Ils retournent sur leur pas, renonçant à la Saintonge. Pour le proconsul, cet épisode genevois représente le début de sa conquête de toute la Gaule, achevée en 50 av. J-C.