La pizza, mets préféré des Genevois

Vidéo: Lorraine Fasler, Frédéric Thomasset, Aymeric Dejardin
Conception, carte et textes: Olivier Bot
Photos: Laurent Guiraud, Frédéric Thomasset, Olivier Bot
Réalisation web: Olivier Bot
Correction:

Poudrée de farine, dansant entre les mains expertes du pizzaïolo, drapée de rouge, sa pâte se pare ensuite d'une pluie d'ingrédients jetés par un semeur qui sait équilibrer couleurs et saveurs. Enfournée, elle ressort dorée et frémissante d'entre les briques chauffées au bois, pour être servie chaude et débordante dans son assiette. La pizza est reine de tablée, été comme hiver. Simple et pas chère, elle a conquis le monde. Elle s'est métissée au contact d'autres cuisines que la napolitaine des origines. Bridée de sushis, tapassée de chorizo ou marinée de crevettes ou de saumon, elle s'habille aux couleurs du pays qu'elle colonise. En Suisse, elle est venue en voisine, chantée par des Italiens qui l'ont inscrite aux menus genevois. Au bout du lac, on ne compte plus les ristorante et laboratorio aux couleurs de Margherita, princesse de l'oriflamme tricolore. Trois établissements genevois, Luigia, Giardino Romano et Nero's Pizza figurent même dans la bible des amateurs, "Where to eat" aux éditions Phaïdon, parmi 1705 pizzerias qu'il recommande. En 2017, Franco Pepe, chef du Kytaly recevait du même guide, le trophée de la meilleure pizza 2017. Est-ce à dire que la pizza est devenue une excellence genevoise et le mets préféré des Genevois? Et puis, celà ressemblerait à quoi une "pizza ginevra"? Petit tour culinaire et historique d'une galette devenue très populaire.



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La vraie pizza napolitaine

En 1984, Antonio Pace et Lello Surace ont réuni les plus fameux pizzaïolos pour établir le canon de la pizza napolitaine. Depuis c'est l'association Verace Pizza Napoletana qui s'est donnée comme devoir de protéger la tradition et les spécificités de cette spécialité.
En voici les caractéristiques: elle est ronde et d'un diamètre de 30 à 35 cm ; des bords épais et gonflés, une pâte douce et élastique garnie d'ingrédients originaires de Campanie, avec une huile d'olive vierge, de la mozzarella ou du fiordilatte DOP, Deux variétés sont inscrites au registre de l'AVPN, la Marinara (tomate, huile, origan,
and ail) qui constituait le repas des pêcheurs (d'où son nom) et la Margherita (tomate, huile, mozzarella ou fior di latte, fromage râpé et basilic).

La pizza s'est pétrie de mille histoires en traversant les âges. Au temps des cathédrales, l'assiette n'a pas encore remplacé l'écuelle ni le tranchoir, cette large tranche de pain sur laquelle on servait le repas. De ce tranchoir fleuriront maints plats servis sur pâte. C'est du latin médiéval que le mot de pizza dérive, désignant alors une fouace ou galette selon un document retrouvé à la cathédrale de Gaète en plein cœur du Latium. Pour retrouver un plat qui commence à lui ressembler, il faut aller chercher du côté de Gênes (Genova en italien si proche de Genève) et d'un condottiere de marine nommé Andrea Doria.
La «piscialandrea» qui fait référence à ce personnage historique pourrait en effet être la première version de la pizza italienne comme de la pissaladière niçoise.


Sous sa forme actuelle, la pizza n'a pas d'autre origine que napolitaine. La plus vieille pizzeria du monde naît en 1738 à Naples. C'est alors un simple comptoir où les passants viennent acheter un morceau de pizza. La première pizzeria ouvre un siècle plus tard. Rue Port'Alba à Naples, le restaurant à l'enseigne de l'Antica Pizzeria Port '​Alba existe toujours.

C'est en dialecte napolitain en 1535 que le mot pizza acquière sa popularité. Un conte populaire écrit en 1634 fait ainsi mention d'un pain de garde garni nommé pizzela qui pouvait être sucré ou salé. La plus proche de celles que nous connaissons aujourd'hui est la pizza bianca mastunicola, qui n’est alors qu’une pâte enduite de saintdoux et garnie d'un peu de fromage et d'herbes dont le basilic. Le petit peuple de Naples, les lazzaronis, mange cette pizza blanche dans la rue. Tandis que dans les palais, les nobles et bourgeois s'attablent autour d'un plat de pâtes, des macaronis à la sauce tomate, qui n'étaient pas à la portée de toutes les bourses. La rue qui regarde en l'air et admire ces belles personnes va alors teinter son quotidien de ce noble rouge. La pizza bianca se recouvre de sauce tomate, cette purée d'un fruit qui débarque dans la botte au XVIe sicèle. La pizza rossa est née de ce mariage.


Le mot pizza apparaît en dialecte napolitain en 1535. Il dérive d'un mot latin qui désignait une galette.

La pizza la plus populaire, aux couleurs du drapeau italien (tomate,mozzarella, basilic) a été baptisée pizza Margharita. Un prénom de femme pour une belle italienne. Ce nom provient d'un supposé récit historique du XIXe siècle.

Umberto 1er, alors roi de Savoie, aurait voulu rallier les Napolitains à sa cause, celle de l'unité italienne. En visite à Naples avec sa femme en juin 1889, il aurait souhaité goûter une spécialité locale. Pour faire honneur au roi, l'une des pizzas qui lui a été présentée, aurait été baptisée Margherita, du nom de son épouse. Cette histoire est sans doute un mythe qui participe au récit national de l'unité italienne, avec le rattachement de Naples au Royaume d'Italie dans la deuxième moitié du XIXe siècle.

Pour l'anecdote, le petit-fils d'Umberto 1er de Savoie, Umberto II, qui régna un peu moins d'un mois en 1946, est mort à Genève le 18 mars 1983 et a été enterré à l'Abbaye royale de Hautecombe en Savoie où l'on peut voir son tombeau.


Source: "Pizza connexion", Sylvie Sanchez, CNRS Editions, 2007 .


Marguerite de Savoie, née Margherita Teresa Giovanna, reine d'Italie.

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