Thérèse Courvoisier



Dans le programme de la tournée du centenaire, Géraldine Knie multiplie les déclarations d’amour. À son idole de jeunesse, Michael Jackson, par l’intermédiaire d’une image souvenir, à son papa dans une lettre ouverte très touchante, à son mari, à ses enfants, à ses chevaux, à ce monde du cirque qu’elle n’échan­gerait pour rien au monde.

Dans la vie, c’est pareil. En français avec sa maman, en suisse allemand avec son «Papi», en Italien avec son mari et ses enfants, elle distribue des mots doux tout au long de la journée, en gardant toujours une main ferme sur les rênes du spectacle. Cavalière un jour, cavalière toujours.

D’ailleurs, dans la roulotte de maquillage réservée à la famille Knie et parquée juste à côté de l’entrée des artistes du chapiteau posé en plein cœur de Zurich en cette fin du mois de mai, les friandises pour chevaux traînent à côté des tubes de fond de teint. Son numéro de dressage à peine terminé, Géraldine Knie nous y retrouve et nous aménage une petite chaise.

À sa droite, son papa Fredy règle les affaires courantes avec son téléphone portable, lunettes vissées au bout du nez, à sa gauche son fils aîné Ivan fait de l’ordre dans ses nombreuses bouteilles d’after-shave alors que sa maman Marie-José s’organise pour aller récupérer une montre dans une bijouterie de la Bahnhofstrasse. À intervalles réguliers, l’intenable Chanel (8 ans) débarque, faisant virevolter la jupette de son costume, téléphone portable rose pailleté à la main.

Regardez-vous encore votre vie avec vos yeux de petite fille?

Oh oui! Je suis une fillette avec des papillons plein le ventre. Tous les jours je suis émue, excitée, émerveillée. Nous y sommes enfin, à cette tournée du centenaire qu’on attend depuis si longtemps.

Avoir un enfant, c’est la meilleure raison de faire une pause. Mais ça a dû être terrible de voir le cirque partir sans vous…

Ah, mais faire une pause ne veut pas dire laisser partir le cirque. Ça aurait été impossible pour moi, comme de m’arracher un bras! Je n’étais pas devant les lumières, mais j’ai toujours été avec les autres. Mes enfants et moi nous ne pouvons pas passer une seule journée loin du cirque. C’est notre vie, notre passion, notre amour.

Comment arrivez-vous à jongler avec autant d’activités à la fois?

C’est dans ma nature, dans mon caractère. J’ai beaucoup de patience et aussi de discipline. C’est aussi utile pour les enfants que pour les chevaux. Il faut leur montrer qu’on les aime et… répéter mille fois les mêmes choses (rires).

Si vous ne deviez retenir qu’un seul moment d’un seul spectacle, ce serait quoi?

Si je ferme les yeux, immédiatement je vois les numéros de mes enfants. Je crois que c’est tout à fait normal pour une mère poule comme moi. Mon Ivan, mon prince qui a bien grandi, puisqu’il aura 18 ans le 6 juillet. Ma Chanel, qui a déjà 8 ans et qui est comme un miroir reflétant qui j’étais à son âge. Et le petit, qui a un an et demi, et fait son spectacle à la maison pour le moment. On verra s’il partage notre passion pour la piste…

Vous êtes née dans la branche «chevaux» de l’arbre généalogique. Vous auriez aimé être trapéziste?

J’ai testé quelques acrobaties ou de l’équilibrisme sur fil de fer, mais ma grande passion a toujours été les chevaux. Les journées sont trop courtes pour tout faire, alors j’ai préféré m’y consacrer pleinement et le mieux possible. Le lien avec l’animal se construit jour après jour. Il n’y a pas que le travail en manège. Ce sont des balades en forêt, à travers champs, aller se baigner avec lui tout au long de l’année.

La famille, c’est encore plus sacré dans un univers comme le vôtre?

La famille, mais surtout le «Zusammenhalt», le fait de se soutenir, de nous serrer les coudes. Moi je vis pour ma famille. Je n’aime pas être seule. Il y a ma famille de sang et la famille élargie du cirque. Alma, la nounou de Maycolino a aussi été la nounou de mes deux aînés par exemple. C’est un tout.

Les Knie, c’est la famille royale de Suisse, non?

(Elle éclate de rire) Non, ça je ne trouve pas! Mais je suis très honorée de la place que nous occupons dans le cœur des Suisses. Ils partagent notre vie. On se sent très proches de notre public ici. Cela se ressent encore plus au moment d’une naissance ou encore à chaque représentation de cette tournée anniversaire.

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Adolescente, vous rêviez d’une vie normale?

Jamais! Pourquoi? Je vis la vie parfaite!

Directrice artistique, un rôle difficile à un moment où le cirque doit faire face à une concurrence énorme et sans cesse se réinventer…

Oui, c’est une énorme responsabilité. Mais j’ai toujours le soutien de ma famille. On ne nous jette pas dans l’eau froide, comme on dit. Chaque année on doit proposer quelque chose d’inédit, surprendre le public et en même temps leur donner du «Knie», qu’ils aiment. C’est à chaque fois un challenge. Il faut des frissons, des animaux, des highlights et surtout beaucoup de rire. Avec Vincent & Vincent je ne me fais pas trop de soucis! Mon papa est très ouvert: il nous accompagne sans nous écraser. On discute beaucoup, il comprend que les choses doivent évoluer. Il émet des réserves, mais me laisse tenter des choses nouvelles. C’est le meilleur père du monde.

Votre mari représente à lui seul cette évolution dans la continuation qui s’opère chez Knie…

Quelle chance j’ai de l’avoir à mes côtés. Je dis toujours que notre rencontre a été comme les six bons chiffres à la loterie! Il n’est pas seulement un artiste, il est toujours le premier arrivé au chapiteau et le dernier à en repartir. Il est très travailleur. Très investi. Et aussi fanatique de cirque que moi. Mon père l’a immédiatement très bien accueilli et ensemble nous réfléchissions à l’évolution du Cirque Knie.